René Desclée - Aéro-Photographe Tournaisien
La photo par cerf-volant : 1918 - 1953
 
 
 
1888 - 1909 1910 - 1911 1912 - 1914

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Tournai : panorama du quartier sud-ouest, 21-5-32
  Dès l'armistice de 1918, des ex-pilotes de l'aviation militaire belge fondent une compagnie de transport aérien, la SABENA, qui voit ainsi le jour en mai 1923. Les nouvelles orientations de l'aviation, devenue soudain très performante, polarisent bientôt l'imagination de la jeunesse.

L'aéromodélisme supplante ainsi complètement le cerf-volisme durant la période de l'entre-deux-guerres. René Desclée, très peu attiré par tout ce qui est propulsé par un moteur à explosion, se garde bien de suivre cette voie.
De retour en Belgique, il réalise un nouveau dispositif pour améliorer encore, si possible, le détail de ses clichés.

 

 

 

Pour obtenir un plus grand négatif, sans pour autant augmenter le poids de son dispositif, il opte pour une solution privilégiant la légèreté où ce qu'il sacrifie à la luminosité est partiellement compensé par une qualité optique supérieure. Son choix se porte donc sur l'objectif Protar, de Zeiss, de 128 mm. de focale et ouvrant à 1:9, lequel était petit, léger. La chambre noire, très simple, est construite en contreplaqué. L'angle d'inclinaison que la rotation permet de donner à l'appareil s'indique sur un secteur gradué. Une minuscule boussole complète cet astucieux dispositif. La chambre, munie de ses accessoires, mais sans plaque, pèse 500 grammes... un record de légèreté pour l'époque!

 

 

Quelles que soient la stabilité du cerf-volant tracteur et la régularité du vent qu'il rencontre en altitude, il est impossible d'assurer l'immobilité de l'appareil photographique qu'il emporte.

René Desclée réalise donc une suspension inédite. La disposition d'une articulation réduit les oscillations latérales. D'autre part, une manche à air, dont l'écoulement aérodynamique est judicieusement calculé, est placée en amont de la chambre, dans le lit du vent. Sa résistance agit progressivement, à la manière d'un amortisseur de balancement s'opposant au mouvement pendulaire. Après quelques tâtonnements, le dispositif se révèle d'une fiabilité telle qu'il ne sera jamais modifié par la suite.

Pour élever sa nouvelle chambre, plus pesante que la précédente, René Desclée décide de modifier un de ses anciens cerfs-volants. Il s'agit d'une sorte de grand Hargrave qu'une photo, datée de 1910, nous montre déjà, dans sa version originale, présenté à Wippelgem par les enfants du photographe.

 

Wippelgem : cerf-volant double quatre, 19-8-1910
 

 

 


Tournai : quartier de la citadelle, 21-5-1932
photo Jules Messiaen
cerf-volant manoeuvré par Albert (à gauche) et René Desclée
 
L'appareil est composé de deux cellules carrées constituées de quatre cellules plus petites. Tout comme le multicellulaire, ce cerf-volant est bridé en double dièdre, c'est-à-dire de manière à voler non à plat mais sur les angles.

La géométrie très classique de ce planeur lui confère une excellente stabilité. Mais dans le but d'en accroître la surface portante, deux des quatre vergues destinées à tendre les cellules avant et arrière sont prolongées de manière à recevoir chacune deux ailerons triangulaires.

La mise au point et les premiers essais photogra-phiques ont lieu à Wippelgem durant les mois d'août et septembre 1920.
 

 

 

Le 5 octobre 1920, de retour à Tournai, il profite d'une journée ensoleillée et d'un bon vent d'Ouest. A présent parfaitement familiarisé avec les manipulations de son nouvel équipement, il choisit la plaine des Manoeuvres comme site d'envol.

L'éclairage, déjà oblique, ne peut qu'accentuer le contraste des ombres portées pour donner aux images un surcroît de relief. Et, d'emblée, les photographies qu'il ramène du ciel ce jour-là se révèlent d'un telle beauté et d'une telle précision qu'elles figurent parmi les réussites les plus accomplies de la carrière de René Desclée.

En 1939, il est nommé président de la Société royale d'Histoire et d'Archéologie. Il est le seul à en être membre effectif et actif durant près de 59 ans.
 

Tournai : église Ste Marguerite, 5-10-1920
 

 

 


Tournai : plaine des Manoeuvres, 30-7-1932
photo Jules Messiaen
 
Habitué à oeuvrer seul et à ne compter en toute circonstance que sur lui-même, il n'en accepte pas moins la compagnie de ses amis.

C'est ainsi qu'au cours des années '30, Jules Messiaen, photographe tournaisien, a l'excellente idée de se munir de son propre appareil photographique lors de prises de vue aériennes au départ de la citadelle. Il est le seul qui nous montre René Desclée sur le terrain de ses exploits.


 
       

René Desclée fait aussi quelques images amusantes, comme ce match de football, vu des airs, ou encore, l'opérateur et les personnes qui l'entourent, saisis à la verticale, d'une très faible hauteur, le nez en l'air et tous aisément reconnaissables. C'est d'ailleurs par une telle image, prise le 2 juin 1939 sur un site de fouilles archéologiques à Antoing, que René Desclée fait ses adieux à l'aérophotographie en s'adressant à lui-même l'ultime clin d'oeil de sa chambre aérienne.

Le cerf-voliste tournaisien est tout proche de 71 ans et, en dépit de sa santé de fer et de sa parfaite condition physique, il estime que, dans ce domaine, sa curiosité est satisfaite et sa tâche accomplie. René
Desclée décède le 5 décembre 1953 à Tournai.