René Desclée - Aéro-Photographe Tournaisien
La photo par cerf-volant : 1910-1911
 
 
 
1888 - 1909 1912 - 1914 1918 - 1953

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Dispositif de photographie aérienne par cerf-volant
construit par René Desclée (dessin F. Chantry)
  Goderus est très certainement à l'origine de la décision prise par René Desclée de se consacrer à l'aérophotographie par cerf-volant.

Toutefois, René Desclée est plus proche d'Arthur Batut de par leur condition sociale d'une part et leurs réalisations techniques d'autre part. Issus tous deux de familles bourgeoises et aisées, les pionniers belge et français vivent en province dans des cités millénaires et se passionnent pour l'histoire locale au point d'y consacrer une partie de leur existence et de leurs travaux.

Les deux hommes, profondément idéalistes, oeuvrant la plupart du temps en solitaires, pratiquent l'un et l'autre, des dizaines d'années durant, la photographie aérienne par cerf-volant, perfectionnant sans cesse leur technique et améliorant leurs résultats, sans jamais se départir de leur modestie.

Tous deux, il est vrai, jouissent de moyens financiers très confortables qui leur permettent de s'adonner tout à loisir à leurs recherches ainsi qu'à leurs expériences.

Chacun d'eux possède d'ailleurs un laboratoire et un atelier fort bien outillé où leur habileté manuelle et leur esprit inventif leur permettent de réaliser entièrement et de manière originale la totalité de leur équipement.

 

 

 

Le 13 avril 1910, un grand jour pour le photographe-amateur qui va prendre sa toute première aéro-photographie par cerf-volant ! Bien préparé et rangé, le matériel est vérifié avec minutie. Tout se passe selon les prévisions les plus optimistes; la banderole déroulée signalant que la photo est prise, il redescend l'appareil et s'en tient là pour ce jour. Mais lorsque, dans son laboratoire, il constate que l'image initiale tant espérée est floue et indistincte, son coeur se serre...

Qu'à cela ne tienne, dès le lundi suivant, soit le 18 avril 1910, il ramène du ciel deux superbes photographies, prises à 150 mètres d'altitude, l'une montrant le quartier Saint-Piat et l'autre le palais de Justice. Non seulement la netteté est parfaite, mais encore le contraste dû à l'éclairage oblique du sujet fait ressortir avec une précision inattendue les détails architec-turaux.

La voie de la réussite s'ouvre ce jour-là et se traduit par une série de 124 aérophotographies par cerf-volant. René Desclée n'est certes pas l'inventeur du procédé mais il sera l'un des hommes, dans le monde entier, à lui vouer la plus longue fidélité ….
elle va durer trente ans !
 


Tournai : Quartier Saint Piat, 18-4-1910

 

 

 


Cerf-volant type lecornu
Environs de Tournai, 2-3-1910
  Le premier appareil photographique de René Desclée destiné aux prises de vue aériennes est entièrement construit par lui-même dans son atelier privé à Tournai. Cette petite chambre noire est faite de bois très léger et elle reçoit des négatifs sur plaques de verre de format 8 x 8 cm.

Quant à son premier cerf-volant c'est un multicellulaire type Lecornu, affectant la forme d'une sorte d'étagère carrée, d'un mètre de côté, constituée de 16 petites cellules carrées légèrement décentrées, lui donnant un aspect très caractéristique qui lui vaut dans les milieux aéronautiques le surnom de gaufre. Il ne pèse que 640 grammes pour une surface portante de 2,5 m., d'où une très faible densité de 256 grammes par mètre carré. Ainsi, il vole sans queue, avec une stabilité incomparable et un excellent rendement. La puissance de traction qu'il développe, par vent moyen, lui permet d'élever sans risque l'appareillage léger de René Desclée.

D'un maniement aisé pour un homme opérant seul, il se replie de manière à ne former, avec voilure et vergues, qu'un ensemble très compact, léger et maniable, se rangeant dans une housse et dont le transport à bicyclette est pratique à souhait.
 

 

 

Dédaignant le treuil, certes pratique mais trop lourd et trop volumineux pour prendre place sur son vélo, René Desclée choisi d'enrouler sur deux dévidoirs à main, deux tronçons de quelques centaines de mètres de câble de retenue.

Parmi les accessoires inséparables, figurent aussi deux longues vrilles en acier, munies d'un orifice destiné à recevoir un levier et qui servent d'ancrage au câble de retenue lorsque le cerf-volant atteint la hauteur escomptée. L'opérateur dispose ainsi de sa liberté de mouvement pour les manipulations du matériel photographique.

Une poulie munie d'une poignée, servant à rabattre le câble après les prises de vue ainsi qu'un dynamomètre complètent la trousse.
 

Accesoires du cerf-volant, 28-12-1931
 

 

 

  René Desclée acquière rapidement une expérience telle que ses vues sont presque systématiquement centrées à la perfection, comme si, d'en haut, il peut viser et cadrer son sujet.

Pour obtenir des images de Tournai, René Desclée opère surtout, selon l'orientation du vent, au départ de la plaine des Manoeuvres, grande surface bien dégagée et toute proche de la cathédrale, ou encore de la citadelle dont les talus surélevés, à proximité de la ville, se prêtent idéalement aux envols du multicellulaire.

Il existe bien peu de sites de la région de Tournai qui ne sont sillonnés par cet étonnant photographe, débordant d'énergie créatrice, au guidon de sa bicyclette surchargée de matériel.

N'oublions pas que René Desclée est un vélocipédiste infatigable et cela jusqu'à la fin de sa vie. Il ne possède pas de voiture et pour photographier les sites éloignés, il utilise le train.

 

 

 

Excellent père de famille, il conjugue ses propres aspirations avec l'agrément des siens afin d'assurer l'harmonie et la sérénité de la coexistence familiale.
Ainsi, il emmène femme, enfants... et cerf-volant durant les vacances dans la petite ville balnéaire de Nieuport.

Il trouve un vent régulier qui se prête idéalement aux expériences d'aérophotographie qu'il effectue au départ de la vaste plage sablonneuse. Dès les mois d'août et septembre 1911, il réalise avec succès des prises de vue à une altitude de plus de 300 mètres et les images 8 x 8 cm se révèlent d'une netteté irréprochable. Par la suite, il achète même une maison à Nieuport.
 

Nieuport : dunes et plage, 23-8-1911