Pendant de nombreuses années nous avons été présents au Festival de Berck sur Mer avec des cerfs-volants monofils. Puis en 1998, c’est le Fil d'Ariane initié par Alain Chevalier.
Nous avons installés plus de 1000 bambous, décorés de bandes de couverture de survie et plantés le long d'un fil rouge, près de la mer. Ce fil conducteur réunissait plusieurs cerfs-volistes, plasticiens et artistes. Ce fil d’Ariane fut à l’origine des jardins du vent actuels, auxquels nous avons collaboré pendant plusieurs années.
Cette année nous voulions participer différemment à ce festival en intégrant la photographie aérienne par cerfs-volants. Une question simple : mais pour photographier quoi ? Les grosses structures gonfables ? Déjà fait et pas très original …. La mer ? la plage ? Et si l’on faisait de grands motifs sur la plage ? L’idée fait son chemin, nous cherchons sur Internet quelques informations pratiques.
En remontant le temps, c'est-à-dire vers la fin des années 60 aux Etats-Unis, le Land Art devient une discipline artistique contemporaine à part entière, dont l’objectif principal était de faire sortir l’art des musées. Les premières œuvres, réalisées dans de grands espaces, étaient conçues à partir de matériaux naturels (terre, cailloux, rochers, pierres, troncs, branches, feuilles, eau). Ces créations sont éphémères puisqu’elles sont soumises à l’érosion naturelle des éléments et du temps.
La seule trace qui restera de ces créations passe par la photographie, notamment aérienne.
De nouveaux « Land Artists » utilisent aussi maintenant le sable et la neige comme matière première. Comme nous le savions, nous ne sommes pas novateur dans ce domaine, mais complément admiratifs des réalisations que nous découvrons, notamment celles du Californien, Jim Denevan.
Pour nos premières réalisations sur le sable nous allons donc nous inspirer de ce qu’il a fait. Pour cette fois le but étant de voir si nous avons les bons outils, la bonne technique, si nous prenons plaisir à le faire et ce que cela donne en aérophotographie. Samedi, il fait froid et il y a un bon vent soutenu. Nous attendons la marée basse, pour être sur un sable qui peut se travailler, et comme la plage de Berck est immense, cela permet d’être assez loin de la foule et de bénéficier d'un grand espace vierge. Nous avons peu de matériel : un outil à ratisser le sable, que Patrick à bricolé, de la ligne et des piquets d’ancrage.
Pour l’instant nous traçons nos motifs et cercles sur le sable avant de ratisser. Jim Denevan est incroyable, il n’a aucun instrument de traçage, sauf s’il s’est fait greffer un GPS dans le cerveau !
Vu du sol, grâce au jeu d’ombre et de lumière, ces dessins prennent une dimension différente, selon notre position face ou dos au soleil.
Le temps de retourner vers notre camp de base, Woki, pour récupérer le cerf-volant et le système d’aérophoto, le soleil a commencé à sécher la couche supérieure du sable, et le vent lui s’est chargé de le déplacer. Notre motif est en parti recouvert. Nous montons le cerf-volant, le Sutton Flowform 16 "Becot", puis accrochons notre nacelle, une AutoKapbeak, avec un système Picavet et le Ricoh GX200. Le déclenchement se fait par l'intermédiaire d'une mini-prise USB.
Je retrace les contours de notre « fresque », mais le vent est plus rapide que moi ! Nous tentons un second dessin, toujours inspiré de Denevan : un jeu de perspective et d’illusion d’optique. Mais notre outil a ratisser n’est pas assez large, nous perdons trop de temps …. Et la mer va remonter.
Satisfaits de cette première : nous avons pris du plaisir, les photos aériennes nous donnent un autre de vue, indispensable pour ce genre d’activité. Le motif ne prend tout son sens que vu du ciel. Nous réitérons le dimanche, mais sommes obligés d’attendre le tout début d’après-midi, marée oblige. Le temps est moins froid, il y a moins de vent et il vient de la mer !
Cette fois-ci nous partons avec notre équipement de prises de vues aériennes, le même que la veille. Ce nouveau motif est composé uniquement de cercles, que nous traçons encore avec un point fixe et de la corde de différente longueur pour avoir des cercles de différentes tailles. Il nous manque un « crayon » que nous pourrions déplacer sans nous courber, une sorte de manche assez long avec un « truc » au bout. Notre ami Joël Goupil va étudier la question, (et je suis sûre qu’au moment où je rédiger ces quelques lignes, il est déjà dans son atelier.)
Nous faisons une première série de photos en montant la nacelle beaucoup plus haut. Au vu des premières prises de vue, nous devons forcer le trait et élargir les contours extérieurs des cercles. Le sable ne réagit pas du tout comme samedi. Il est beaucoup plus humide, il y a moins de contraste de couleur.
Pendant que Patrick explique aux curieux ce que nous faisons, je m’affaire à retracer les contours.
On re-décolle cerf-volant et nacelle, et nous n’avons pas le temps de prendre la première photo qu’un char, lancé à toute vitesse, traverse nos cercles !! Soit, il sera sur la photo … mais je dois effacer ces traces si nous voulons une photo plus « propre ». Les dessins n’existent que pour quelques heures mais suffisamment pour les prendre en KAP.
Notre bilan de cette première expérience : Très contents de nous (on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même !) : de l’avoir fait et du résultat. Ce type de travail ne prend tout son sens que par la photo aérienne, et dans notre cas par cerf-volant. Très contents aussi des réactions d’un public peu nombreux mais très intéressé. Donc expérience à renouveler, avec plus d’outils.
Une réflexion en cours : Comment intégrer le « Sand Art » dans les festivals ? A t’il une place dans ce type de manifestation ? Comment faire participer le public ? A priori pas pendant la réalisation, quoique.. Ou après en les intégrant dans les motifs, pour qu’il fasse partie de la création ? A suivre !
Découvrir Jim Denevan transformant les plages du Nord de la Californie avec des œuvres étendues mais éphémères de concept Land Art. :